Interview de Carole Matz, Directrice de l’EHPAD Le Menhir et de l’accueil de jour Villa Fleurie, à Cergy (95), qui nous fait part de son retour d’expérience en cette période de déconfinement progressif.
Comment le déconfinement des résidents s’est-il organisé au Menhir ?
Le déconfinement a commencé le 11 mai, la Résidence semble être en fête !
La semaine d’avant, le restaurant s’est paré d’une nouvelle couche de peinture afin que lundi 11 mai, les Résidents s’y sentent à l’aise. Ce nouvel environnement leur permet de dynamiser à nouveau leur appétit et leurs papilles. Le lien social s’y recréée et contribue également à leur plaisir gustatif.
En effet, le confinement et l’isolement ont porté leurs fruits concernant le COVID-19 mais l’impact moral de cette réclusion se fait encore sentir et il nous faut aujourd’hui rattraper la conséquence des absences imposées et de la distance avec les liens familiaux.
Comment les familles réagissent-elles à cette nouvelle organisation ?
Dans un mail du 20 avril, les familles ont été prévenues que les visites allaient reprendre mais aussi que celles-ci allaient très réglementées et uniquement à l’initiative de l’établissement. Les familles comprennent l’enjeu de ce déconfinement progressif, elles sont d’accord pour respecter cette douce évolution.
Lorsque je ressens une once d’incompréhension ou une quelconque difficulté de leur part, des questions ou des appréhensions, je décroche rapidement le téléphone afin que nous puissions nous parler de vive de voix.
Nous travaillons en étroite collaboration avec l’équipe d’encadrement qui prend le relai afin d’accompagner les familles les plus en difficulté ou celles qui sont le plus pressantes.
Comment les premières visites des familles se sont-elles déroulées?
Les familles ont été prévenues en amont que leurs visites suivraient le protocole suivant :
- Signature de la charte du visiteur
- Prise de température
- Explication des mesures d’hygiène et distribution du flyer…
Les rendez-vous sont validés par la direction et le staff, rendez-vous qui sont ensuite pris auprès des secrétaires qui tiennent un tableau de suivi très précis.
Les résidents sont prévenus en amont et accompagnés auprès de leur famille par un membre de l’équipe de soins.
Afin d’accueillir ces retrouvailles dans un cadre agréable et printanier nous avons privilégié le jardin et les terrasses joliment fleuries. Ceci permet le respect des distances imposées tout en favorisant une intimité nécessaire à la réappropriation de la communication et du lien.
Les visites se passent donc à l’extérieur ou en salle à manger si le temps est morose.
Les premières visites furent empreintes d’émotions et de pleurs de joie. Les familles nous ont parfois dit qu’elles trouvaient leur parent changé. Cette nécessité de proximité, ce lien familial si fort distille le bonheur par petites touches dans les cœurs des Résidents et de leurs familles.
Il y a parfois eu des situations cocasses et douloureuses car certains Résidents ont parfois eu du mal à reconnaître leurs proches. Après quelques minutes, la mémoire auditive a permis d’identifier la voix du parent visiteur.
En tant que Directrice, quel est votre retour d’expérience sur cette nouvelle phase post-confinement ?
La phase post-confinement me semble moins facile à mettre en œuvre que la phase de confinement.
Dans la phase de confinement il faut appliquer les directives, les équipes sont en alerte et il n’y a pas de possibilité de faire autrement.
Dans la phase de déconfinement, il y a cette notion « d’allégement », qui vient contraindre la vigilance.
Nous nous devons de redoubler d’attention car nous entrons tous dans une phase « d’habitude » où nous sommes moins sur le qui-vive. Les familles sont demandeuses de voir leurs parents, les Résidents se languissent de voir leurs enfants, il faut contenir l’impatience tout en accédant aux demandes. Un exercice de contorsionniste doté d’une grande capacité d’adaptation et de communication, en somme. Mais quel bonheur de voir la tendresse quasi-palpable, les sourires qui éclairent le visage des Résidents et les regards qui s’animent dès lors qu’apparaît le proche si longtemps attendu…
Carole Matz, Directrice de l’EHPAD Le Menhir et de l’accueil de jour Villa Fleurie
